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Drone qui peut !
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14 July 2025

Drone qui peut !

un drone dirigé par un pilote

Porté par un vent d'innovation, l'usage gagne du terrain dans le milieu professionnel (crédit : Envato).

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Porté par des vents ascendants, le marché du drone est en pleine expansion au Luxembourg. Tous secteurs confondus, l’activité a enregistré une hausse de 85 % d’exploitants en deux ans. Pour accompagner l’émergence de cet écosystème encore en structuration, une nouvelle entité a pris son envol en mai dernier : le Luxembourg Drone Center, dernier-né des pôles d’expertise du Centre national de formation professionnelle continue (CNFPC).

Drone. Ces dernières années, ce mot survole l’espace médiatique. Drones de combat, drones de reconnaissance, drones « kamikazes », etc. Pas un jour (ou presque) ne se passe sans qu’ils ne soient évoqués dans les zones de conflits armés. Leur ombre menaçante ne semble pas prête de se dissiper : les analystes estiment que plus de 9 millions de drones militaires – bon marché et parfois artisanaux – seront produits par l’Ukraine et la Russie en 2025.

En parallèle de cette application militarisée, le drone cultive une image bien plus rassurante dans ses versions destinées à des fins civiles, commerciales et industrielles. Sur ces segments aussi, le marché connaît un emballement spectaculaire.

Des chiffres qui donnent le vertige : selon un rapport de Mordor Intelligence (société internationale d’analyse de marché qui a l’oreille du club fermé des 500 entreprises les plus valorisées des Etats-Unis), le chiffre d’affaires mondial généré par l’économie des drones atteindra 41,79 milliards de dollars en 2025 ; l’étude prophétise par ailleurs une croissance soutenue de 13,9 % par an d’ici 2030.

Longtemps annoncé, souvent retardé, l’industrie du drone décolle enfin.

Le Luxembourg s’inscrit dans cette tendance. Au 13 mars 2025, la Direction de l’aviation civile au Luxembourg (DAC) recensait 4.144 exploitants de drones. Un chiffre en progression de 85 % au cours des deux dernières années : « Cela reflète un intérêt croissant pour les drones civils, tant pour les loisirs que pour des usages professionnels », explique Laurent Goedert, chargé de direction du Centre national de formation professionnelle (CNFPC) à Ettelbruck.

« Les candidats doivent se former à l’étranger, le plus souvent en France, en Allemagne et en Belgique »

[ Christophe Struck, responsable des formations du Luxembourg Drone Center ]

Depuis mai dernier, le CNFPC héberge le Luxembourg Drone Center, entité destinée à étoffer une offre de formation quasi inexistante au Grand-Duché. Jusqu’à présent, seule la DAC (en collaboration avec l’Aviation Learning Center de l’Organisation européenne pour la sécurité de la navigation aérienne) dispensait un enseignement conforme à la réglementation européenne. Le suivi de ces cours théoriques et pratiques permet de piloter dans la catégorie dite “ouverte”, réservée au grand public.

Des formateurs de drones sur un terrain vague
Le Luxembourg Drone Center propose des formations certifiantes ponctuées de séances pratiques (crédit : Luxembourg Drone Center).

Pour les opérateurs de drones ambitionnant des certifications plus poussées, la voie de l’exil s’imposait : « Dans la catégorie “spécifique”, la DAC ne gère que l’examen. Les candidats doivent se former à l’étranger, le plus souvent en France, en Allemagne et en Belgique », précise Christophe Struck, responsable des formations du Luxembourg Drone Center. Ce déracinement n’est pas sans conséquence : l’apprentissage met naturellement l’accent sur les législations aériennes en vigueur dans ces pays. Lesquelles diffèrent du Luxembourg: « En France, le survol des agglomérations est interdit, tout comme les vols de nuit. Ce n’est pas le cas chez nous », prend pour exemple Christophe Struck. Ce type de spécificités impacte les taux de réussite : en moyenne, seuls 33 % des postulants obtiennent leur certification (dans la catégorie spécifique) au Grand-Duché. Fort d’un catalogue de formations sur-mesure parfaitement adaptées aux particularismes locaux, le Luxembourg Drone Center entend doper ce ratio.

Des drones dans tous les secteurs

Ce nouveau pôle d’expertise accompagne aussi la montée en puissance des drones dans le milieu professionnel. Leur utilisation se généralise dans de nombreux secteurs d’activité, comme l’agriculture. Pionnière en la matière, elle voit dans ces aéronefs le parfait allié pour mener des campagnes ciblées au sol : épandage d’engrais, collectes de données (niveau d’azote, de chlorophylle, biomasse, taux d’humidité, stress hydrique), surveillance des parcs et pâturages…

L’usage du drone s’impose également dans les milieux de la construction et du génie civil (surveillance et inspection de chantiers, nettoyage de bâtiments), les infrastructures et la logistique (inventaire de stocks, inspection des réseaux de transport), l’environnement et le développement durable (surveillance et protection de la biodiversité, gestion des risques naturels) ou encore les médias et la communication (prises de vue aérienne, couverture d’événements) : « Le Corps grand-ducal d’incendie et de secours (CGDIS) dispose d’un département dédié aux drones et à la robotique, ajoute Christophe Struck. 50 personnes volontaires peuvent intervenir avec des drones. Jusqu’à présent, ces personnels devaient se former en Allemagne. A la rentrée de septembre, ils intègreront nos filières. » Et ils ne seront pas les seuls.

Renforcement du cadre législatif

Le Luxembourg Drone Center devrait très rapidement devenir un hub incontournable pour les adeptes de drones. Ne seraient-ce que pour la diversité de ses contenus pédagogiques, la qualité de ses équipements et ses sites dédiés aux exercices pratiques (l’aérodrome de Noertrange et le terrain d’aéromodélisme d’Olm).

Un autre élément, plus nébuleux, plaide pour son succès. Le cadre législatif, plus précisément son volet répressif, est appelé à se durcir. Car à l’exception de certains sites sensibles répertoriés sur le géoportail g-o.lu, « l’activité se développe dans une zone grise, souligne Laurent Goedert. Un exemple ? Un pilote de drone doit nécessairement détenir un numéro d’exploitation. Le problème, c’est que la police grand-ducale n’a pas accès à cette base de données. » Actuellement à l’étude à la Chambre des députés, un projet de loi nationale viendra combler ce vide réglementaire. Dans les grandes lignes, le futur texte prévoit notamment une obligation d’assurance pour tout drone circulant dans l’espace aérien luxembourgeois, des sanctions pénales et encore un renforcement des contrôles opérés par la DAC et la police.

Pour éviter les turbulences, mieux vaut préparer son plan de vol avec le Luxembourg Drone Center !

Le Luxembourg expérimente le transport de sang par drone

Un drone décolle d'un hôpital au Luxembourg
(crédit : MMTP)

Une première en matière de logistique médicale s’est déroulée dans le ciel luxembourgeois le 10 juillet dernier. Un drone électrique a acheminé un échantillon de sang depuis les Hôpitaux Robert Schuman (Kirchberg) jusqu’aux Laboratoires Réunis à Junglinster. Ce vol inaugural, réalisé dans le cadre du projet Griffin, marque un tournant pour la médecine. Le projet Griffin rassemble Laboratoires Réunis, Luxembourg Air Services, POST Luxembourg et Santé Services dans une alliance technologique visant à révolutionner le transport d’échantillons médicaux. Lancée en juillet 2023, l’initiative explore l’usage des drones dans un cadre sécurisé, durable et hautement performant. Cette grande première ouvre la voie à d’autres essais et modélisations, avec pour objectif une intégration progressive dans le quotidien médical luxembourgeois, notamment dans les zones rurales ou lors d’urgence sanitaire.

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