Skip to content

Inscription

Clean Something For Nothing : nettoyer la nature avec application
It's my story

5 minute(s)

16 May 2025

Clean Something For Nothing : nettoyer la nature avec application

César Gonzalez-Fernandez dans les locaux du Social Business Incubator

César Gonzalez-Fernandez a bénéficié de l’accompagnement du Social Business Incubator pour la création de sa SIS, consacrée au ramassage de déchets. (crédit : Charly Petit / Chambre de Commerce)

Imaginez un monde où les rues des villes, les parcs et les forêts seraient exempts de tout déchet ! « Génial mais impossible ! », direz -vous. Et pourtant, une startup du Luxembourg, qui est aussi une SIS (Société d’Impact Sociétal) a décidé de se remonter les manches et d’attaquer le problème pas à pas, ou plutôt sac par sac !

Ce qui a démarré comme une action militante bénévole au sein d’un groupe d’amis est en effet devenu un mouvement international en faveur de la planète, grâce à la puissance de la technologie et à un système malin, imaginé par César Gonzalez-Fernandez, à l’origine de Clean Something For Nothing (CSFN) . La solution s’adresse à toute personne de bonne volonté qui désire restaurer la pureté de la nature. Elle intéresse également des entreprises, des communes et a même attiré l’attention du salon international Change Now (Paris) qui fait autorité dans le domaine du développement durable et qui a invité la startup à pitcher son concept lors de sa dernière édition en avril 2025. Pour comprendre comment fonctionne cette appli qui séduit, Merkur est allé à la rencontre de César, son créateur.

Pouvez-vous résumer l’activité de CSFN en quelques mots et nous raconter comment tout a commencé ?

Clean Something For Nothing est une application mobile qui connecte des gens pour nettoyer la planète, un sac à la fois. Ceci est la mission que nous nous sommes fixée. Tout a commencé en 2018. À ce moment-là, je faisais du ramassage de déchets par conviction, durant mes loisirs. Puis, au cours d’un voyage en Europe de l’Est, je me suis mis à faire des posts sur les réseaux sociaux à propos de cette activité. Ceux-ci ont été partagés et sont devenus viraux. À la base, les mots Clean Something For Nothing composaient le hashtag que j’avais créé pour ces publications. Petit à petit, celui-ci a pris de l’importance. Aujourd’hui, on compte 17.000 posts comprenant ce tag.

Durant la pandémie de Covid, avec mon ami Lester Perez Santos qui a adoré le concept et qui est un pro du développement software full stack, nous avons décidé de créer une application dédiée. Le but était de mieux mesurer l’impact de ces actions spontanées qui se développent un peu partout dans le monde. Pour l’imaginer, nous avons parlé avec notre communauté de ramasseurs de déchets. Nous leur avons demandé quelle serait l’application idéale pour eux, ce qui pourrait les aider et nous avons aussi étudié tous les commentaires, positifs et négatifs, sur les applis existantes. Ainsi, nous savions ce qui était apprécié et ce qu’il fallait éviter et nous avons pu établir notre feuille de route.

Ensuite les choses se sont enchainées. L’application a été lancée en 2022, en français, anglais et espagnol et nous avons obtenu le statut de Société d’Impact Sociétal le 1er janvier 2024.

« Notre raison d'être est la restauration de la nature. »

[ César Gonzalez-Fernandez ]

Pourquoi avoir lancé CSFN au Luxembourg ?

C’est dû aux hasards de la vie. Il y a quelques années, j’ai pris un congé sans solde pour voyager et j’ai visité plusieurs pays d’Europe, en partant d’Espagne où je suis né et où je vivais. Le Luxembourg, découvert à cette occasion, m’a plu. Puis j’y suis retourné. Avec ma compagne, nous voulions nous expatrier pour vivre une expérience différente et nous avons réfléchi aux destinations possibles. Comme je parle français pour avoir vécu à Paris, nous avons choisi le Luxembourg car nous y avions identifié de bonnes opportunités de carrière pour nous deux. Nous nous y sommes installés en 2019. C’est donc, tout naturellement que l’histoire de CSFN s’est écrite ici.

Vous êtes hébergé dans un incubateur dédié à l’entrepreneuriat social. Qu’est-ce que cela vous apporte ?

Nous avons fait partie de la première cohorte du Social Business Incubator qui existe depuis deux ans. Nous avons candidaté pour participer au programme Touch BASE, proposé par l’incubateur pour accompagner pendant quatre mois les porteurs de projets d’entrepreneuriat social en phase d’idéation, pour les aider à les transformer en projets viables. Pour intégrer l’incubateur, il faut passer quelques étapes de sélection. J’ai la chance d’avoir été retenu et, au terme des quatre mois de coaching, mon idée a terminé « gagnante » et j’ai remporté un hébergement gratuit de trois ans au sein de l’incubateur. C’est une chance énorme.

Votre application est utilisée dans plus de 70 pays. L’aviez-vous pensée internationale dès le départ ?

En fait cela s’est fait naturellement. Le mouvement de ramassage citoyen de déchets existait déjà un peu partout. Le hashtag #Cleansomethingfornothing est devenu viral à l’international de façon spontanée. Ce n’était pas une stratégie. Notre volonté en revanche a été de développer immédiatement l’interface dans trois langues différentes. Et aujourd’hui, c’est une vraie fierté de voir sur la carte de l’application que des ramassages s’organisent sur tous les continents. Cela nous permet de mesurer notre impact et cette dimension mondiale est très appréciée par les entreprises qui ont envie de travailler avec nous.

Groupe d'enfants de l'école saint George à la fin d'une opération de collecte de déchet
La force de l’application repose sur son côté extrêmement simple et ludique. Ici, une opération avec les écoliers de Georges International School dans le cadre du World Cleanup Day 2024. (crédit : CSFN)
Alors justement, parlons de votre business model. Quels sont vos charges et vos revenus et comment s’équilibrent-ils ?

Nos charges ne sont pas très importantes. Depuis le début, nous nous efforçons d’utiliser le moins de ressources possible. En fait, mon salaire est le principal poste de dépense car je travaille à plein temps pour CSFN, mais il est plafonné par la loi sur les SIS, comme c’est le cas aussi pour les ASBL. Du côté des revenus, ceux-ci proviennent essentiellement des entreprises et des communes. Pour les entreprises, nous avons deux types d’offres. D’une part nous proposons d’organiser des opérations de ramassage de déchets avec leurs employés en fournissant tout le matériel nécessaire. Ces opérations ont un double impact car pour chaque kilo de déchet récolté, nous nous engageons à planter un arbre en partenariat avec une société spécialisée.  Ce type d’opération fonctionne très bien pour du team building. Nous pouvons également animer des workshops.

D’autre part, nous avons une offre virtuelle Pick N’ Plant grâce à laquelle une entreprise peut décider de consacrer un certain montant à une opération vertueuse pour la planète et nous nous occupons de mobiliser notre communauté de ramasseurs pour atteindre un objectif défini en nombre de kilos de déchets ramassés et de convertir chaque kilo en autant d’arbres plantés. Tout cela est dûment documenté et certifié et peut figurer dans des rapports de développement durable. Comme nous sommes une SIS dont le capital social se compose de 100% de parts d’impact, les dons que nous recevons des entreprises sont déductibles des impôts de cette entreprise.

« C’est une vraie fierté de voir sur la carte de l’application que des ramassages de déchets s’organisent sur tous les continents. »

[ César Gonzalez-Fernandez ]

Et pour les communes, que proposez-vous ?

Nous proposons des packages en collaboration avec ecofluent, une autre SIS spécialisée dans la réduction des déchets. Nous y animons des challenges avec objectif de ramassage de déchets (par exemple 1000 kilos pour la ville de Steinfort). Nous pouvons nous occuper de l’événement de lancement et de toute la communication qui entoure l’opération. La commune paye au moment de la mise en place de ses spécificités dans l’application puis par mensualités. La mise en place du programme comprend l’application, une landing page personnalisée, des QR codes deep-link (qui redirigent les utilisateurs vers un contenu spécifique au sein de l’application, ndlr) et un accompagnement constant. Les communes qui souscrivent à notre solution peuvent aussi bénéficier de l’alerte littering qui est très simple d’utilisation et qui permet à n’importe quel habitant de signaler un dépôt sauvage au moyen d’une simple photo géolocalisée par le système, ce qui facilite grandement le travail des services d’hygiène de la ville.

L'application CSFN permet de connecter des gens pour l'organisation d'actions de ramassage de déchets dont les résultats sont mesurables. (crédit : Clean Something For Nothing)
Que deviennent les déchets ramassés ?

Pour le moment, ils sont traités comme des déchets résiduels en mélange car ils ne sont pas triés. Mais au moins ils ne sont plus dans la nature. Le gros avantage des opérations de ramassage est leur portée pédagogique. Chaque personne qui participe à une opération prend conscience de l’impact négatif de jeter des déchets dans la rue ou la nature et, en principe, elle ne le fera plus et sensibilisera également son entourage aux bonnes pratiques.

Pour le moment nous avons voulu lancer une solution la plus simple possible pour motiver un maximum de gens à l’adopter. Pour le futur, nous espérons avoir des moyens supplémentaires pour la développer et explorer par exemple les possibilités offertes par l’IA pour scanner les déchets ramassés et faciliter leur tri.

Un impact chiffré (au 13 mai 2025, date de l’interview)

  • CSFN est présent dans 77 pays
  • 6.500 ramassages
  • 812.299 kg
  • 6.903.000 litres
  • 603 arbres plantés
  • 600 utilisateurs individuels de l’app (certains utilisateurs sont en fait des groupes donc cela équivaut à beaucoup plus de ramasseurs, ndlr)
  • L’application est notée 4,9/5 car facile à utiliser, pratique, motivante
Quelles sont vos autres ambitions pour le futur ?

Dans un futur proche nous allons participer le 20 septembre prochain au World Cleanup Day une date qui fait partie du calendrier officiel de l’ONU, organisé chaque année par l’ASBL Let’s Do It World (Estonie) depuis 2018 et qui rassemble des millions de personnes dans le monde. CSFN est le leader de cette opération pour le Luxembourg.

Notre raison d’être est la restauration de la nature donc notre objectif est que de plus en plus de kilo de déchets ramassés donne lieu à la plantation d’arbres. Pour cela nous devons convaincre plus de communes et d’entreprises de s’engager à nos côtés. Nous avons remarqué que le fait d’associer la plantation d’arbre à chaque kilo de déchet ramassé est un moteur de motivation très puissant. Les chiffres sont très encourageants (voir encadré) mais nous n’en sommes qu’au début.

Merkur Magazine

L’ÉDITION PRINTEMPS
2025
EST DISPONIBLE!

Cover Magazine
Cover Magazine
Cover Magazine